Maladie de Rendu-Osler : THALIDOMIDE, le RETOUR

par hadjora Ven 9 Avr 2010 - 16:14

On pourrait parler de façon grandiloquente d’un « retour en grâce » de la ou du thalidomide, médicament prescrit comme sédatif aux femmes enceintes il y a une cinquantaine d’années, doté d’un effet tératogène non exploré – à l’époque – lors des expérimentations précliniques, et responsable, en Grande-Bretagne et en Belgique notamment, de malformations congénitales des membres chez les nouveau-nés (phocomélie). Ce médicament fut retiré du marché mondial en 1961.

La publication par Franck Lebrin, de l’INSERM U 833 Angiogenèse embryonnaire et pathologique, et coll. (français, néerlandais et britanniques), annoncée comme une découverte par les médias, n’annonce en fait qu’une application de plus de la thalidomide : viser une cible endo-artérielle, les cellules murales, des vaisseaux sanguins. Les chercheurs français citent le cas de 7 patients souffrant d’hémorragies vasculaires répétitives dues à la maladie de Rendu-Osler (MRO) chez lesquels l’administration orale de thalidomide a réduit fortement ces symptômes .

Recherche : Chez 7 patients MRO, âgés de 48 à 75 ans, on a observé que l’administration orale quotidienne de 100 mg de thalidomide réduit fortement la fréquence et la durée des saignements de nez et permet d’éviter le recours à des transfusions sanguines pour corriger l’anémie induite. L’équipe fait état d’un suivi de 6 mois à 5 ans de ses patients.

Le sujet d’étude de l’U 833 est l’angiogenèse, la formation et l’expansion des systèmes vasculaires dans les tissus, un phénomène identifié au début des années 1970 (J. Folkman) comme un des facteurs de croissance des tumeurs et de l’implantation de leurs métastases. Le développement des premiers anti-angiogéniques en cancérologie est l’un des progrès pharmacologiques marquants du 20e siècle.

Pour l’INSERM, cette nouvelle application de la thalidomide est source d’espoir pour contrôler la croissance des vaisseaux sanguins dans des pathologies spécifiques. Depuis quelques années, elle est réintroduite très encadrée et de façon restreinte pour le traitement de quelques pathologies rares. Outre ses propriétés anti-angiogéniques, c'est un modulateur du système immunitaire et de l’inflammation. Des études très encadrées lui ont défini des cibles thérapeutiques étroites : myélome multiple (c’est le cas en France), lèpre, lupus érythémateux disséminé (LED), maladies inflammatoires et hémorragiques comme la maladie de Crohn, pathologies dermatologiques : aphtose sévère. Plus de 50 essais cliniques sont actuellement en cours dans le monde pour valider l’intérêt de la thalidomide dans le traitement des tumeurs solides (sein poumon, prostate) comme anti-angiogénique.

L’identification de ce nouveau mode d’action de la thalidomide pourrait donc aussi permettre de « redorer quelque peu le blason du médicament », selon Franck Lebrin.

Source : Communication INSERM